Transcript of the original liner notes
JIMI HENDRIX EXPERIENCE
Jimi m’a défini sa musique comme étant du “Freak’n Funky”. Il a de suite voulu associer à sa réussite Mitch Mitchell et Noel Redding. Il déclare très confiant qu’ils jouent dans son esprit. C’est évident. La batterie de Mitchell est percutante, quant à la basse de Redding, elle complète le tout d’une façon admirable. L’intégrité, l’homogénéité du groupe est réelle. Il pense qu’il ne fut pas été possible de réaliser l’Experience avec des musiciens blancs américains : inférieurs aux Anglais, ce n’est qu’une question de mentalité et d’état d’esprit nécessaires à la musique d’Hendrix.
Le métier, Jimi l’a appris auprès des grands noms du R’n’B, qui lui ont apporté l’expérience, mais il déclare n’avoir guère été influencé par leurs genres respectifs. Son style lui est propre. Cela fait déjà plusieurs années qu’il est testé, mais ce n’est que depuis quelque temps qu’on lui attache de l’importance.
Jimi admet toutefois qu’il a été marqué par une certaine forme de blues dont il a très vite donné une version “Free-Form”. Il pense — il en a le droit — que sa musique se suffit et espère que le nom de Hendrix sera bientôt synonyme d’un style de musique comme l’est celui de Chuck Berry, par exemple.
Sa dextérité deviendra légendaire. Ses doigts parcourent le manche de la guitare avec une rare sûreté et c’est là qu’on devine les nombreuses années de pratique. La guitare n’a, pour lui, plus aucun secret. Généralement, il improvise. Jimi est, dans l’exécution de ses mouvements, d’une rapidité à toute épreuve : du revers de la main, du coude, il caresse sa guitare ; bien sûr, il a quelques trucs faciles, comme le fait de gratter ses cordes derrière la nuque ou entre les jambes. Mais, alors que, chez d’autres, cela tourne au numéro de cirque, chez Hendrix, on devine autre chose : la ferveur.
Je m’explique. Pour Jimi, la guitare, c’est tout. Il m’a confié par ailleurs que sa guitare tenait, chez lui, l’importance et la place que peut avoir une femme chez d’autres. Alors, en toute pudeur, j’ai comparé son jeu de scène instinctif à l’accomplissement d’un acte sexuel, ce qui ne l’a nullement offusqué : il ne m’a guère contredit.
Pendant, je vous affirme que ce n’est pas tout… Une fantastique version de “Hey Joe”. Il est tout en feu, désireux d’en donner plus encore. Une nouvelle guitare fait son entrée. Puis, il entame une fantastique version de “Wild Thing”. Déjà, entre temps, il a plusieurs fois changé de guitare, à cause des cordes cassées ou parce qu’il désirait obtenir une nouvelle sonorité. C’est alors qu’il atteint le sommet. La guitare contre un pied d’ampli atteint alors son paroxysme d’énervement tandis que les baguettes volent en éclats. Le visage hagard, il en arrive à taper sa guitare contre les amplis qui se mettent à vaciller dangereusement. Soudain, il délaisse sa guitare et, comme vidé, quitte précipitamment la scène, pendant que se prolongent longtemps encore les effets de Larson… Grandiose, démentiel, suffoquant, délirant.
Jean-Noël COGHE,
de la revue Rock & Folk
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Photo: J.-P. Leloir
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